Christian Louis : autoportrait

Christian Louis
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photo : enfants sur un mur, Aubervilliers

Son travail documentaire—1

Pour Christian Louis et les autres jeunes photographes français de son époque, le défi impérieux était de dépasser la tradition humaniste et de développer un nouveau vocabulaire visuel en réponse aux forces sociales et économiques qui remodelaient la France et la séparaient irrévocablement d’un passé mythique. Dans la période précédant Mai 68, Paris attire des groupes expérimentaux et engagés comme le Living Theatre de New York, dont le travail est fortement influencé par Artaud, Brecht, Cocteau et les Situationnistes, et le théâtre alternatif de cette période mouvementée devient le sujet du premier projet à long terme de Louis qui aboutit à une exposition et à une proposition de livre inédit, Le Goût des Planches (1975).

Christian Louis est un passionné du Royaume-Uni et y fait plusieurs voyages entre 1964 et 1990, dont une visite prolongée en août 1977 qui le mène à Londres, à Liverpool et sur la côte est de l’Écosse, via Perth, Dundee, Aberdeen et Inverness. Cette visite, en particulier la courte période passée à Liverpool, a sans doute influencé le style de sa documentation de la banlieue parisienne, effectivement isolée de la ville par la construction du boulevard périphérique.

Dans l’après-guerre, Doisneau, Ronis et d’autres photographes humanistes témoignaient de la convivialité de ces quartiers et des plaisirs simples gagnés sur fond de pauvreté. Cette image de cohésion sociale, de joie de vivre et de résistance collective à l’adversité, largement popularisée par les magazines des années 50, a contribué à créer un mythe nostalgique de la vie quotidienne en France, en grande contradiction avec la désindustrialisation et la misère sociale qui se sont installées après les Trente Glorieuses. Dans un nord de l’Angleterre confronté à un recul similaire et rapide, Christian Louis a instinctivement trouvé, avec une objectivité tempérée par l'empathie, un moyen de documenter ce bouleversement de la vie quotidienne des quartiers populaires pendant les dernières années du 20e siècle.

De retour en France, Christian Louis s’est lancé dans le premier de ses projets de banlieue, un portrait d’une commune multiculturelle située juste à l’extérieur du nouveau périphérique à côté de Saint-Denis. Fortement industrialisée à partir du début du 20e siècle avec des maires majoritairement communistes depuis 1945, Aubervilliers était sur le déclin dans les années 1970, effectivement prise entre deux époques et attendant avec espoir l’arrivée du métro pour initier une vague de régénération tardive : une période de transition et de changement culturel que Christian Louis a documentée avec un regard discrètement empathique.

Alors que le nord industrialisé de la France et les banlieues ouvrières de Paris tombaient dans le déclin postindustriel, un phénomène parallèle se produisait à la campagne que Christian Louis a documenté dans son livre, Nationale 7 (1988). Cernée par les autoroutes des années 60 et 70, la N7 se trouve abandonnée au moment où le consumérisme, l’agriculture mécanisée et l’étalement urbain remodèlent la France et la société française. Ce livre est imprégné du sentiment de perte et d’oubli qui envahit les villes et les villages autrefois prospères et maintenant délabrés tout au long de l’ancienne route du Sud…

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